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PUY L'ÉVÊQUE à travers les âges

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Sur une idée du Comité des fêtes, ce texte composé par Marie Claude GAGÉ, Présidente de l’Association PUY L’ÉVÊQUE-Patrimoine fut lu avant le tir du feu d’artifice, le dimanche 7 août 2022. Pour des raisons de temps imparti à la réalisation de cette tâche, ce texte a subi une légère contraction. Le Blog vous en livre la version complète.

Sources :

«Puy L'֤Évêque, découverte et mémoire de mon village» de Jacques MAYSSAL.

• Bulletins municipaux de 2001 et 2002 (Puy l’Evêque info)



Dame PUY L’ÉVÊQUE âgée de plus de mille années revêt ses habits de lumière pour vous recevoir ce soir. Elle s’apprête à vous raconter son Histoire, mais pour cela il faut remonter le temps et revenir quelques années avant notre ère.


De 58 à 52 avant JC.

CÉSAR se rendit maître de la tribu « cadourque » (gauloise) dont le PUY faisait partie. L’illustre général romain fit construire des voies comme celles de BORDEAUX à TOULOUSE via AGEN …et via PUY L’ÉVÊQUE.

La région a subi le joug romain après la dernière bataille de la guerre des Gaules. Les romains qui ont occupé la GAULE durant cinq siècles semblent avoir vécu sur nos hauteurs comme l’attestent quelques pièces de monnaies retrouvées dans l’actuel quartier des Singles à PUY L’ÉVÊQUE en 1890.


La fin du IXe siècle et le début du Xe siècle.

Cette période fut marquée par quelques incursions des Normands avec à leur tête ROLLON, viking. Bons navigateurs et vrais pillards, ils remontaient les cours d’eau, détruisant tout sur leur passage, ils sont sûrement passés sur le site du futur PUY L’ÉVÊQUE en remontant la vallée du LOT.


Vers l’An mille.

Notre village existait en tant que collectivité humaine puisque l’on trouve son nom dans des textes.

C’est à cette période que le vieux français commença à remplacer le latin dans les rares écrits qui nous sont parvenus. PUY L’ÉVÊQUE n’était encore qu’une réunion de fiefs dont la famille DEL PUG était tenancière et rendait hommage à des barons partisans du Comte de TOULOUSE.


Au XIIe siècle.

Aliénor d’AQUITAINE, fut couronnée reine de France en 1137 puis répudiée par Louis VII roi de France en 1152. Huit semaines plus tard, elle épousa Henri II de PLANTAGENÊT qui devint roi d'ANGLETERRE en 1154. Après avoir été Reine de France, elle devint Reine d’Angleterre en faisant suivre sa dot : la GUYENNE.

le 25 juillet 1137, par son mariage avec Aliénor d’Aquitaine, le roi de France devint duc d’Aquitaine. Pour autant, le duché d’Aquitaine ne fut pas rattaché au domaine royal, et Aliénor en resta la duchesse. Il en fut de même, lorsqu’elle épousa Henri de Plantagenêt. Avec ce dernier, elle eut trois filles et cinq fils qui défendirent plus tard leurs territoires reçus en héritage.


Au XIIIe siècle

La population du Sud-ouest, dépendante du Comte de TOULOUSE, lasse des guerres et accablée de charges, se laissa séduire par une nouvelle doctrine religieuse : le catharisme ou hérésie albigeoise. Elle fut d’autant plus alléchée qu’elle assistait au relâchement de la discipline du clergé.

Elle gagnait le sud du QUERCY et notammant les abords de PUY L’ÉVÊQUE, le Comte de TOULOUSE en était lui-même adepte.

Guillaume de CARDAILLAC comte Evêque de CAHORS de 1208 à 1234 et illustre militaire ecclésiatique à cette époque, en dépit de sa subordination au Comte de TOULOUSE soutint Simon de MONTFORT qui menait croisade contre les Albigeois et lui fournit des troupes pour combattre cette hérésie.

Le catharisme apparut au milieu du XIIe siècle dans le Sud-Ouest de la France à une époque où le pape (Innocent III (1198-1216) ) plaçait son autorité à la tête de tout autre pouvoir dans le contexte de l’après “réforme grégoriennne”. Cette doctrine condamnait l’enrichissement de l’Église romaine ainsi que la morale dépravée de ses prélats qui ne respectaient pas l’idéal de vie et de pauvreté du Christ. Elle fut une mouvance chrétienne manichéenne qui croyait à l’existence de deux mondes : celui du mal et celui du bien et prônait entre autres, une pureté absolue des mœurs. Les Cathares refusaient le dogme de la Trinité, le Père étant d’une essence supérieure au Fils et au Saint Esprit. Le monde n’avait pas de fin puisque le jugement dernier avait déjà eu lieu. L’enfer était en ce monde.

En 1208, le pape Innocent III, prit comme pétexte l’assassinat de l’un de ses prélats : Pierre de Castelnau, pour lancer la croisade contre les albigeois, à laquelle il avait appelé à plusieurs reprises depuis 1204. Il fut ainsi à l’origine d’une guerre particulièrement violente contre les anticléricaux et évangélistes du Midi de l’actuelle France, déclarés hérétiques. En 1213, il confia cette lutte à l’Inquisition, tribunal ecclésiastique d’exception.


En 1211, Simon de MONTFORT concéda le comté de CAHORS à son évêque : Guillaume de CARDAILLAC. Les fiefs qui constituaient la seigneurie DEL PUG furent réunit à l’évêché. Guillaume de CARDAILLAC jugea prudent d’officialiser le rattachement des dîmes de PUY L’ÉVÊQUE au domaine du comte-évêque de Cahors par une bulle du pape Grégoire IX édictée en 1227 au Concile de LATRAN.

Guillaume V de CARDAILLAC - ÉVÊQUE de CAHORS ( 1208-1235) fut en 1211, le premier des évêques Cadurciens à faire hommage du comté de Cahors au roi de France. Il devint ainsi Baron du Roi alors que ses prédécesseurs ne relevaient que du comte de Toulouse. C’est à ce titre qu’il se rendit à la cour pour prêter serment successivement à Philippe Auguste (1211), à Louis VIII (1223) et à Saint-Louis (1229) promettant que le comté ne serait jamais aliéné de la couronne.

Guillaume V de CARDAILLAC entreprit d’importants travaux pour rendre le Lot naviguable et accorda des privilèges, notamment celui de battre monnaie aux consuls de Cahors à partir de 1224. L’évêché et la cité se sont partagés les droits sur la Monnaie, bien que l’évêché ait été seul détenteur du droit de fabrication, ce qui est rappelé dans plusieurs actes dont celui de 1267.

image3, Cardaillac

Le blason des Cardaillac en Quercy : armes “De gueules, au lion d’argent, armé, lampassé et couronné d’or ; à l’orle de treize besants d’argent."

Le début du Moyen age a vu l’émergence d’un nouveau corps social : “l’aristocratie nobilaire” qui s’imposa rapidement au sein de la monarchie en acquérant des titres et des privilèges qui allaient devenir héréditaires. La féodalité se constitua par l’appropriation héréditaire des bénéfices ; le clergé, déjà riche prit sa place dans cette nouvelle organisation sociale.

Nombre d’évêques, grands propriétaires fonciers étaient comtes de leur ville épiscopale, tels ceux de Cahors, le Puy, Clermont…La double dignité de Comte et d’évêque mêlait le “pouvoir temporel” et “l’autorité spirituelle”. Temporel et spirituel côte à côte interféraient parfois.


PUY L’ÉVÊQUE rentra dans l’histoire à cette période.

On parlait alors de la paroisse de PUY L’ÉVÊQUE limitée à l’ouest par le LOT, au sud et à l’est par le ruisseau des Clédelles, au nord, par les quartiers de Laborde et l’Ameillée et au nord-ouest par le quartier de la Télide. Cela représentait 150 ha à comparer aux 2638 ha de la commune actuelle.

PUY L’ÉVÊQUE a porté successivement les noms de : PUECH, PUG PODIUM EPISCOPI (1313), PUY LIBRE (1794), PUY SUR LOT (au début du Directoire), PUY L’ÉVÊQUE (depuis le 1er Empire), nom qu’elle porte aujourd’hui. (Pech, Pug ou Puy issus du latin désignent un lieu élevé).


En 1271.

Sous l’impulsion de Louis IX, PUY L’ÉVÊQUE reçut une charte des coutumes avec droit d’élection de 6 consuls (magistrat municipal chargé de l’administration de la ville). Cette charte qui marquait le début de l’autonomie de la gestion des villes et villages, prévoyait par contrat signé, les usages, coutumes, privilèges, devoirs et châtiments.


La fin du XIIIe siècle.

Cette période fut marquée par l’essor de l’agriculture, du commerce et de l’artisanat. La navigation sur le LOT fut améliorée et des chemins de halage furent établis, barrages et écluses n’existaient pas.

De cette époque datent les premières confréries et corporations.

Après un hommage rendu au roi, les évêques commencèrent à bâtir PUY L’ÉVÊQUE. Un hôpital et une léproserie furent d’abord entrepris. La lèpre sévissait dans le QUERCY et un véritable hameau regroupait alors ces malades. Selon les habitudes de l’époque, la léproserie fut située de façon que les vents dominants ne poussent pas les effluves malins vers le village occupé par la population saine. Son existence fut révélée par des enregistements de donations dans des actes notariés.

L’actuelle tour de la Mairie était le cœur d’un éventail de trois lignes de remparts. L’une de ces lignes rejoignait l’église qui formait ainsi le bastion Nord-Est et les autres plongeaient vers le LOT.

L’une des merveilles du site classé est la salle capitulaire appelée LA LYCHAIRIE qui fut une ancienne dépendance du palais épiscopal mais aussi une salle d’audience des vassaux qui souhaitaient protéger les populations contre l’hérésie.

L’église St Sauveur, à l’initiative des Seigneurs de GUISCARD commença à naître. Son achèvement demanda deux siècles (XIV et XVe siècles). Mais à peine cette construction terminée, on dut fortifier la ville et l’église.


Pendant la guerre de Cent Ans (1337 à 1453).

PUY L’ÉVÊQUE avec sa position stratégique sur le LOT fut occupée par les assaillants anglais à plusieurs reprises. L’antagonisme des familles royales françaises et anglaises s’est traduit par des conflits intermittents où le QUERCY fut une zone tampon.

Les limites de la Guyenne varièrent avec les vicissitudes de la domination anglaise. Les cartes ci-dessous, de 1360 et de 1429 de Gardiner’s Atlas, illustrent l’amplitude de ces variations.

la Guyenne en 1360 lors du traité de Brétigny - - - la Guyenne en 1429 après la prise d’Orléans (avec Jeanne d’Arc)

image1, Guyenne1360 - - - image1, Guyenne1429

La conquête de la GUYENNE par les Français s’achèva en 1453 par la bataille de Castillon suivie de la prise de Bordeaux. La GUYENNE fut alors unie au domaine royal français. Ce lien fut définitif malgré une ultime et vaine tentative de reconquête en 1512 par Henry VIII.

Il est très probable que l’église Saint Sauveur initiale fut endommagée par les Anglais et que ces derniers, pour gagner les faveurs de la population locale, aient encouragé la progression de sa construction.


Au XVe siècle.

C’est en 1441 que PUY L’ÉVÊQUE fut définitevement libérée des Anglais. La royauté sortit renforcée de la guerre de Cent Ans, mais il fallut plusieurs générations pour que le QUERCY se repeuple et se reconstruise.

Au XVe siècle.

Le vin de Cahors fit son entrée à la cours de François 1er semble-t-il grâce à Galiot de GENOUILLAC (1465-1546), Seigneur d'ASSIER en QUERCY. PUY L’ÉVÊQUE vit éclore de nombreuses résidences qui traduisirent la prospérité retrouvée due, en grande partie, au développement du commerce et de la viticulture dans le monde rural.


image1, Nocturne780


Sous nos yeux ce soir, nous voyons danser dans le reflet de la rivière, la silhouette gracieuse du château de Beauregard coiffé de sa petite tourelle posée sur une plate-forme permettant d’admirer le paysage alentour.

Au-dessus, l’élégant Castel Renaissance flanqué de sa tour hexagonale. Puis nous baissons notre regard sur l’imposante bâtisse du château Bovila qui a peut-être abrité des chevaliers en son temps.

La tour tronquée nous apparaît sur la droite, insolite et séduisante.

Peut-être apercevrons nous sur la droite de la colline, le clocher de l’église et sa tour de guet qui veillent sur notre bien-être. Et, là-haut, tout là-haut, la tour carrée de l’ancien palais épiscopal qui tutoie le ciel dans toute sa majesté.


image1, église780


Le XVIe siècle.

  • Dès 1520, pénétrèrent en France les doctrines de la réforme. Les premiers protestants apparurent non loin d’ici « Aux JUNIES ».

Malgré les assauts des troupes d'Henri de NAVARRE chef du parti protestant et futur Henri IV, PUY L’ÉVÊQUE résista et resta catholique. Les assaillants, avec à leur tête François de CAUMONT, levèrent le siège sans avoir pu pénétrer dans la ville.


  • En 1598, La signature de l'édit de Nantes tolérant dans une certaine limite le culte protestant mit fin à plus d’un demi siècle de conflits.

Le QUERCY était ruiné et saccagé ; misères et épidélies réapparurent ainsi que des bandes d’insurgés originaires de provinces voisines.

  • En 1599, l’évêque de CAHORS fit distribuer des secours aux pauvres des localités de son diocèse, PUY L’ÉVÊQUE en faisait partie.

La seconde moitié du XVIIe siècle.

Elle amena un peu de calme en QUERCY. Mais les impôts augmentèrent provoquant des révoltes paysannes.


Le XVIIIe siècle.

Il vit s’abattre sur la région de nombreuses calamités climatiques. Les mauvaises récoltes et des difficultés d’échange entre les régions sinistrées dues au piètre état du réseau routier ont fait que la misère s’installa dans les campagnes quercynoises.

1788 et 1789 furent particulièrement catastrophiques, les intempéries ravinèrent les sols. A PUY L’ÉVÊQUE, une partie des terres cultivables fut abandonnée. La révolution gronda…


Pendant la Révolution.

Un cahier de doléances des communautés de PUY L’ÉVÊQUE fut présenté par les élus aux Etats Généraux. Il n’évoquait pas de problèmes politiques majeurs mais des revendications sur les voies de communication, la fiscalité, la liberté de commerce ainsi que les contraintes que le Bordelais faisait peser sur la circulation des vins et la navigation sur le LOT. L’histoire de PUY L’ÉVÊQUE a toujours été étroitement liée à la rivière LOT. Dès le Moyen Age le port était déjà actif. Contrôler la navigation était une priorité permanente.


Au XIXe siècle.

Le quartier de la Cale dit Cale du commerce battait son plein : le port était encombré de tonneaux et de bois qui attendaient d’être embarqués sur les gabarres. Le « douanier », veilleur perché sur une des tours de la vieille ville disposait pour tout confort d’une lanterne et d’un grabat ; il avait pour mission d’avertir au son de la trompe la maison éclusière dès qu’une embarcation se présentait pour le passage. La courbure du LOT aux abords de PUY L’ÉVÊQUE rendait indispensable la surveillance à l’approche des bateaux.

Les gens de la rivière formaient une communauté à part. Les mariages se faisaient entre familles de bateliers ou dans les professions liées à leurs activités tel que charpentiers, tonneliers, vignerons. Ils étaient également très pieux, et tout au long de la rivière LOT, églises, chapelles et oratoires étaient très nombreux. On y rendait hommage ou remerciait la Vierge d’un voyage fait sans difficulté.

La pêche était florissante dans les eaux de la rivière avant que des aménagements successifs tout au long de son cours portent un coup fatal aux poissons migrateurs. Les derniers saumons aperçus datent de 1885.


Dès le XIXe siècle.

De grands travaux furent entrepris. Des bruits résonnèrent alors de toute part, l’actuelle Grand' Rue qui ne fut longtemps qu’un ravin, fut élargie en 1845 et des maisons s’y alignèrent côté sud, elle devint la rue marchande. Puis le train tant attendu arriva.


Au début du XXe siècle.

Les commerces s’installèrent tout au long de la Grand’ Rue. Le soir, à la fraîche et à la seule lueur des réverbères à pétrole, les Puy-l’évêquois assis sur des bancs installés tout le long de la chaussée se racontaient leurs journées et commentaient les nouvelles du jour.

Très vite en 1904, l’éclairage public fut mis en service. Un soir de 1908, les langues allèrent bon train car une automobile avait remonté la Grand' rue : jusque-là seules les charrettes tirées par des bœufs constituaient le trafic.

Puis ce fut le temps des foires : les bovins étaient exposés à l’actuelle place de l’église nommée autrefois place du foirail. Le terrain en pente permettait de mettre en valeur la musculature des animaux présentés à la vente. Quant aux ovins, on les regroupait en bas de la ville Place de la Liberté.

Dès l’aube, on percevait le claquement des fouets et les jappements des chiens. Les places de la ville se couvraient d’étals de petits métiers. Les fermières des alentours déversaient sur les trottoirs les produits de leurs basses-cours et de leurs potagers.

En fin d’après-midi, les cafés et restaurants étaient bondés, car la coutume voulait que l’on clôture la foire par un bon casse-croûte appelé « vinage ».


Aujourd’hui.

Les commerces sont plus structurés, le cœur de la ville a cessé de battre aux cris et à la frénésie des jours de foires.

Le train a arrêté de siffler en 1971, mais en parcourant les ruelles, nous retrouvons les traces des vieilles maisons enracinées au sol. D’autres sont accrochées à la pente, plein pied d’un côté, étage de l’autre.

Les noms de ces ruelles évocateurs de cloutiers, sabotiers et tant d’autres métiers rappellent ces artisans qui exerçaient leur savoir-faire ponctué par la résonance des marteaux et la précision de leurs gestes.



Ce soir, quand le feu d’artifice aura cessé d’embraser le ciel, la nuit enveloppera la noble dame PUY L’ÉVÊQUE qui s’endormira.

A son réveil, elle percevra le brouhaha des jours de marché, le bruit des voitures roulant sur ses vieux pavés et le bruissement des visiteurs d’un jour qui la découvriront avec ravissement.


image1, Feu530 -